8 décembre 2011

[Mgr Vingt-Trois - Le Parisien ] «Golgota Picnic»: «Un spectacle caricatural» pour l’archevêque de Paris

SOURCE - Mgr Vingt-Trois - Anne-Cécile Juillet - Le Parisien - 8 décembre 2011

Mgr Vingt-Trois, l’archevêque de Paris, s’émeut du contenu de la pièce « Golgota Picnic » qui commence ce soir. Des intégristes appellent à manifester.

Une lecture provocante des Evangiles, une scène de crucifixion trash, un Jésus traité de « putain de diable » : « Golgota Picnic », la pièce de l’auteur Rodrigo Garcia, jouée jusqu’au 17 décembre au Théâtre du Rond-Point, à , soulève les passions chez certains catholiques, après avoir été jouée à Toulouse en novembre.

Le mois dernier, déjà, le spectacle de Romeo Castellucci, « Sur le concept du visage du fils de Dieu », avait mobilisé chaque soir plusieurs dizaines de manifestants, répondant à l’appel de l’Institut Civitas, bras politique de l’intégriste Fraternité Saint-Pie X. Ils promettent une mobilisation sans faille contre « Golgota Picnic ». Deux jeunes, proches de cette mouvance, ont déjà été arrêtés ce week-end en train de saboter les systèmes d’alarme du théâtre. Pour éviter toute intrusion malintentionnée, la préfecture de police a prévu un système de filtrage très serré. Le maire de , , a exprimé hier son « inquiétude » et son « indignation », rappelant que « la liberté de création et d’expression est une valeur fondamentale de notre République ». L’archevêque de Paris, André Vingt-Trois, appelle, lui, à une veillée de prière à Notre-Dame.
Pourquoi avoir organisé une veillée de prière, ce soir, au moment de la programmation de la pièce « Golgota Picnic »?
Mgr Vingt-Trois: Ce spectacle n’est pas du même ordre que l’œuvre « Piss Christ » ou la pièce « Sur le concept du visage du fils de Dieu », de Romeo Castellucci. Elles prêtaient à interprétation, mais n’étaient pas à mon sens délibérément offensantes. Cette fois, avec « Golgota Picnic », nous sommes face à un spectacle caricatural par rapport à la personne du Christ et à sa Passion, qui induit des interprétations assez grossières.
Certains ont déjà annoncé leur intention de manifester de façon moins pacifique…
Mais enfin, cela n’est qu’un spectacle! Pour nous, il ne s’agit pas simplement d’exprimer notre désaccord et notre tristesse, mais aussi notre amour à la personne du Christ, d’une manière ajustée. Le Christ, lors de sa Passion, n’a pas eu un mot d’accusation, de condamnation ou de violence. Nous avons, à son exemple, à exprimer une attitude de miséricorde, non violente. Et comme Notre-Dame de Paris est dépositaire de la couronne d’épines portée par le Christ au moment de son procès, nous avons choisi d’y organiser une veillée de prière et de méditation autour de la Passion. Quant à l’Institut Civitas, c’est une initiative particulière, sans mandat de l’Eglise catholique. 
Quel sens a le terme blasphème, en 2011, dans le domaine de l’art? 
Le blasphème, c’est une agression contre Dieu, délibérée. Or je ne connais pas les intentions du créateur de ce spectacle, et donc il ne m’appartient pas de dire s’il s’agit d’un blasphème ou non. Quant à la dérision, cela fait des siècles qu’elle alimente l’art, tout cela n’est pas bien nouveau…
Pensez-vous qu’en France il existe une quelconque « christianophobie »?
Ceux qui parlent de christianophobie utilisent un vocabulaire inadapté. Sommes-nous un lobby qui essaye de se poser en victime? Non! Nous sommes une Eglise qui se croit assistée par la force de Dieu. Considérons plutôt les vraies victimes d’attaques antichrétiennes : au Moyen-Orient ou au Pakistan. Oui, là-bas les chrétiens paient de leur vie leur appartenance à l’Eglise. Mais en France, de grâce, ne mélangeons pas tout. Même si elle fait souffrir, la dérision n’est pas une persécution physique…